21 Octobre 2020
C'est aujourd'hui que je commence le récit de notre voyage dans le Gansu ! Après 12 jours dans le Yunnan et 13 jours dans le Sichuan, nous voilà en route pour 15 jours dans cette province du nord-ouest de la Chine qui me faisait rêver depuis si longtemps !
Le Gansu 甘肃, c'est cette longue province du nord-ouest de la Chine, entourée de terre. A l'ouest du Gansu, le Qinghai 青海 et le Xinjiang 新疆. A l'Est, on retrouve les provinces autonomes de Mongolie Intérieure 内蒙古 et du Ningxia 宁夏, ainsi que le Shaanxi 陕西. Au Sud, c'est le Sichuan 四川.
Ce qui m'a plu, et ce qui, j'imagine, intrigue tous les voyageurs au Gansu, c'est la diversité de cette région. Au nord, des terres arides, en marge du désert de Gobi et sur l'ancienne route de la Soie. Au sud, ce sont les montagnes et les vallées verdoyantes du plateau tibétain, où broutent les yaks et courent les marmottes. Le Fleuve Jaune, Huang He 黃河, sépare la province en deux, et traverse sa capitale, Lanzhou 兰州.
Le Gansu, c'est aussi une diversité culturelle, ethnique et religieuse. Le Gansu est une province très diversifiée, à l'intersection de nombreuses cultures (Han, Hui, nomades mongoles, tibétaines...). Il est peuplé d'environ 30 millions d'habitants, 90% de Han, mais aussi d'importantes minorités Hui et Tibétaines (notamment au sein des préfectures autonomes Hui de Linxia et Tibétaine du Gannan), mais aussi des Mongoles, des Kazakhs et des Ouighours. Auprès de ces communautés, les langues, dialectes et religions cohabitent également sur le territoire. On trouve donc, au Gansu, des mosquées, des temples bouddhistes, et des monastères tibétains.
Vous l'aurez compris, le nord et le sud du Gansu sont complétement différents ! Et, à moins de ne disposer d'au moins deux semaines, c'est compliqué de voir les deux ! J'ai trouvé le Sud plus nature et spirituel, et le Nord plus culturel et plus historique. J'imagine que ce qui intéresse la plupart des gens, c'est le nord, la route de la soie, les racines du bouddhisme en Chine, la partie occidentale de la muraille, le parc géologique de Danxia... En tous cas, ce qui est sûr, c'est qu'il y en a pour tous les goûts au Gansu !
Néanmoins, je ne m'attendais pas à ce que le Gansu soit si touristique ! J'en parlerai je pense dans d'autres articles, mais j'ai été très surprise. Comme je le dis souvent, je n'ai aucun problème avec les endroits dits "touristiques", et c'est normal que certains endroits attirent plus de monde que d'autres. Néanmoins, certains lieux touristiques sont complétement transformés en parc à thème, en mode Disneyland du désert.
Nous sommes arrivés à Lanzhou, en provenance de Chongqing. Comme je le racontais dans un article précédent, à la base nous pensions arriver dans le Gansu par le sud, en ayant traversé le nord du Sichuan. Finalement, comme le parc de Jiuzhaigou était encore fermé suite au tremblement de terre, nous avions décidé d'éviter le nord du Sichuan et nous sommes passés par Chongqing. De Chongqing nous avons donc pris un train pour Lanzhou, pour ensuite redescendre le Gansu jusqu'au sud (Langmusi) et le remonter jusqu'au nord (Dunhuang). Cela nous a fait gagner pas mal de temps sur notre trajet, puisque le train rapide met 7h pour faire Chongqing-Lanzhou (traverser le nord du Sichuan nous aurait pris deux jours en bus). Notre itinéraire était donc le suivant :
Comme partout en Chine, le Gansu est très safe. Cela dit, j'ai envie de dire un peu trop ! Dans le sud du Gansu, il y a une très grosse présence policière et militaire, et ça m'a mis assez mal à l'aise de voir cette oppression dans la préfecture tibétaine. Sur la route, il y avait beaucoup de barrages de police, on se faisait contrôler assez souvent, et, comme on était généralement les seuls étrangers du bus Antoine et moi, on se faisait tout le temps sortir et amener au poste pour un contrôle approfondi. Rien de bien méchant, ils nous posaient juste des questions sur notre itinéraire, vérifiaient la raison de notre séjour et la validité de nos permis de résidence. Mais pour les Tibétains et les pèlerins à Labrang, le quotidien n'a pas l'air très facile à vivre, si je puis dire…
Dans le nord du Gansu, on avait aussi ce sentiment de "sur-sécurité", notamment dans les gares. Généralement, les gares en Chine sont très surveillées et les contrôles très stricts. Dans le Gansu, prendre le train c'est comme prendre l'avion, il est interdit de voyager avec certains liquides et aérosols (j'ai dû jeter mon déodorant et ma crème solaire). Aussi, si vous prévoyez un voyage dans le Gansu, et particulièrement au nord, sachez qu'il y a beaucoup d'auberges et d'hôtels qui n'acceptent pas les étrangers (et du coup les établissements qui acceptent les étrangers sont plus chers).
A part ça, j'ai plein d'histoires loufoques à vous raconter de nos voyages en train dans le nord du Gansu, mais cet article est déjà bien trop long, alors je vais les garder pour les prochains !
On a eu, au Gansu, la plus belle météo de tout notre voyage d'un mois et demi à travers la Chine ! Nous n'avons pas échappé à quelques averses (même à Dunhuang !), mais il a fait un temps magnifique ! Adieu, pluies incessantes du Sichuan et du Yunnan, et bonjour le soleil et le ciel bleu !
Néanmoins, contrairement à ce qu'on peut penser, il ne fait pas si chaud que ça dans le Gansu. Enfin, en été il peut bien faire 35 à Lanzhou et dans les zones les plus chaudes, mais ça ne va pas plus loin. Nous y étions en août, et il faisait d'ailleurs assez frais dans le sud et en altitude. Il peut y faire -20 en hiver et il peut même neiger en plein été ! Dans le nord, le climat est certes plus aride, mais les nuits d'été sont fraîches et les nuit d'hiver sont glaciales, même dans le désert !
Ces 2 semaines dans le Gansu nous ont coûté 8298 rmb pour deux (4149 chacun), ce qui est, je trouve, assez cher (nos 12 jours au Yunnan nous ont coûté presque 3fois moins).
Pour arriver à Lanzhou de Chongqing, nous avons pris un train rapide. Malheureusement, il n'y avait plus que des billets en première classe, et ça nous a donc coûté 824rmb. Par ailleurs, pour repartir de Dunhuang, la dernière étape de notre voyage d'un mois et demi à travers la Chine, nous avons pris un train pour retourner à Lanzhou (on avait un avion à Lanzhou pour retourner dans le Guangdong). Bref, pour finir ce voyage en beauté, nous avons opté pour un voyage en train de nuit en couchette deluxe et en compartiment individuel. C'était génial ! Par contre, ce plaisir avait un prix puisque les deux billets nous ont coûté 1592rmb (mais ça valait grave le coût !).
J'ai beaucoup aimé le Gansu, que ce soit le Nord ou le Sud, c'était très enrichissant et extrêmement intéressant. J'ai adoré découvrir un bout de la route de la soie, son art bouddhiste, et tous ces paysages désertiques m'en ont mis plein les yeux.
Enfin, et surtout, je dois dire que j'ai eu un immense coup de cœur pour le sud et la préfecture tibétaine du Gannan. J'étais déjà tombée amoureuse des préfectures tibétaines du Garze et de Diqing, mais alors le Gannan c'était un véritable coup de foudre ! Vraiment, j'ai laissé un bout de mon cœur sur cette colline à Langmusi.
La cuisine du Gansu, et du nord-ouest en général, inclue beaucoup de viande, notamment des viandes de bœuf, de mouton et d'agneau. Il y a cependant très peu de porc dû à l'influence des minorités musulmanes. Je ne mange pas de viande, donc je ne vais certainement pas me ruer sur les célèbres brochettes d'agneau qui foisonnent dans les rues du Gansu, mais ça ne m'a pas empêché de me gaver d'à peu près tout ce qu'on pouvait trouver sur notre route !
Evidemment, je ne peux pas parler de la cuisine du Gansu sans évoquer les célèbres nouilles de Lanzhou ! Les lamian 拉面, « nouilles tirées », sont des nouilles fraîches, étirées à la main, et les plus populaires, les Lanzhou Lamian 兰州拉面, sont, comme leur nom l’indique, originaires de Lanzhou, la capitale du Gansu. Le procédé de fabrication est unique, et il existe depuis des siècles ! Elles se déclinent de plein de façons différentes, le plat le plus populaire étant les niurou mian 牛肉面, les nouilles au bœuf. Généralement elles sont servies en soupe, mais elles peuvent être 干 gàn, sèches, et chao 炒, fries (j’ai tendance à préférer celles-là d’ailleurs !) C’est pas cher, simple, bon, et hyper populaire ! On en trouve dans toute la Chine, surtout dans les restaurants musulmans qu'on appelle Qingzhen 清真 en chinois, et qui désigne la cuisine Halal des Hui, des Ouighours et des autres ethnies musulmanes de Chine. Ils servent des plats halal et de la cuisine du nord-ouest (et des Lanzhou Lamian, évidemment), et ces restaurants sont réputés pour leur propreté.
Par ailleurs, on trouve au Gansu beaucoup d'épices, de piment, de pommes de terre, et aussi beaucoup de plats d'autres provinces du Nord-Ouest, comme la province voisine du Shaanxi. Le Shaanxi 陕西 est réputé également pour ses plats de nouilles, ses plats à base de mouton, d'agneau, ses biang biang mian et ses célèbres pains à la viande. En tous cas, moi qui suis une fan de Liangpi 凉皮 et de Liangfen 凉粉 (deux plats de "nouilles" froides), j'étais servie !
J'imagine que la plupart d'entre vous raffolent des roujiamo 肉夹馍 ! Originaires de la province du Shaanxi, on en trouve partout en Chine, et ils foisonnent dans le Gansu ! Ce genre de sandwiches, souvent considéré comme le hamburger ou le kebab chinois, peut être au porc, sinon au bœuf, et dans le Gansu ils sont souvent à l’agneau et épicés au cumin.
On trouve aussi beaucoup de fruits secs dans le Gansu ! Qu'est ce que c'est joli !
Le Nord de la Chine cultivant plus de blé, on trouve évidemment plus de nouilles que de riz, mais aussi beaucoup de pain. Il y en beaucoup de sortes, mais le plus commun c'est ce genre de flatbread, qu'on appelle, je crois, mian bing 面饼, et qui est généralement servi avec un plat de nouilles, de viande, de liangpi 凉皮 ou de niangpi 酿皮, une sorte de nouille à base de farine, servie avec de l'huile, du vinaigre, de l'ail, du piment et du concombre.
Dans le sud du Gansu, on retrouve aussi une prédominance de la cuisine tibétaine, à base d'orge, de viande, de beurre et de fromage de yak. Le Thukpa est une soupe originaire de la région de l'est du Tibet et de l'Amdo (l'Amdo est une des 3 régions historiques du Tibet, et le sud du Gansu fait partie de l'Amdo). Lorsqu'elle est agrémentée de nouilles tirées à la main, on l'appelle Thenthuk. En chinois, on appelle ces nouilles 安多面片 anduo mianpian, nouilles de l'Amdo.
Niveau boisson, mis à part la Huang He 黄河, la bière de Lanzhou (qu'on ne peut évidemment pas boire dans les restaurants musulmans), il est impossible de rater le 杏皮水 xingpi shui, un jus d'abricot (apricot peel water). Tout le monde en boit dans le nord du Gansu, les enfants comme les adultes, et on en trouve partout !
Enfin, je ne peux pas parler de la nourriture dans le Gansu sans évoquer les fameuses chuanr 串儿, les brochettes dont le parfum embaume les rues et que l'on accompagne de bière ou de Dayao 大窑嘉宾, un soda originaire de la province voisine de Mongolie Intérieure et qui est très consommé dans le nord du Gansu !
Voilà, j'espère que ce premier article sur le Gansu vous a plu, j'ai hâte de vous raconter la suite !