4 Novembre 2020
J'avais tellement hâte de vous parler de Langmusi ! J'en ai déjà beaucoup, beaucoup parlé sur instagram, et au cas où vous n'aurez pas compris, je suis absolument tombée amoureuse de cet endroit ! Comme j'avais beaucoup de photos et beaucoup de choses à dire, j'ai décidé de faire plusieurs petits articles. Ça aurait été beaucoup trop long sinon.
Langmusi 郎木寺 est un petit bourg d'environ 4 000 habitants, niché dans une vallée à plus de 3300m d'altitude à l'est du plateau tibétain, au sud du Gansu.
La ville est coupée en deux par la rivière Bailong 白龙江, un affluent du fleuve Jialing 嘉陵江, lui-même un affluent du Yangzi 扬子江 (aussi appelé 长江 chang jiang en chinois). La rivière Bailong prend sa source un peu à l'ouest de Langmusi. Au sud de la rivière, c'est le Sichuan, et au nord, c'est le Gansu.
Langmusi 郎木寺 signifie "temple de Langmu". Pour cette raison, vous le verrez souvent traduit en anglais par Langmu Monastery, mais il y a bien deux monastères à Langmusi (j'en parle plus bas). En tibétain, la ville s'appelle Lhamo, ce qui signifie fée. C'est joli, et ça lui va à ravir.
Dans un article précédent (ici), je vous parlais de la Région Autonome du Tibet, des préfectures autonomes tibétaines et du Tibet Historique.
Pour rappel, le "Tibet Historique", ou "le Grand Tibet", correspond au territoire historique tibétain, avant l'annexion par la Chine et le redécoupage du territoire (voir carte ci-dessus). C'est l'aire culturelle et ethnique tibétaine, revendiquée par le Dalai Lama, bien plus grande que ce qu'on nomme aujourd'hui Tibet et qui correspond à la Région Autonome du Tibet. Le Grand Tibet incluerait également le Qinghai, 1/5e du Xinjiang, 1/3 du Gansu, 2/3 du Sichuan et 1/4 du Yunnan.
Le Tibet Historique est composé de 3 régions : le Kham, l’Amdo et l’U-Tsang. Je vous ai notamment déjà beaucoup parlé du Kham tibétain au cours de mes récits de voyages dans l’ouest du Yunnan et du Sichuan. Le sud du Gansu, quant à lui, fait partie de l'Amdo.
En Chine, au sein des provinces, sheng 省, on retrouve des préfectures, des villes-prefectures, et des préfectures autonomes, zizhizhou 自治州, essentiellement peuplées de minorités ethniques. Il y a 9 préfectures autonomes tibétaines : la préfecture de Diqing dans le Yunnan (avec Shangri-la), deux dans le Sichuan (dont celle du Garze avec la réserve de Yading), quatre au Qinghai, et une au sud Gansu, celle qui nous intéresse aujourd'hui, la préfecture autonome tibétaine du Gannan 甘南. En chinois, son nom complet est 甘南藏族自治州 gannan zangzu zizhizhou.
Comme je le disais dans l'article précédent où je vous présentais nos 2 semaines dans le Gansu (ici), le Gansu est une province très diversifiée, à l'intersection de nombreuses cultures (Han, Hui, nomades mongoles, tibétaines...). Il est caractérisé par une diversité ethnique et religieuse, et peuplé notamment de bouddhistes et de musulmans.
Le Gannan étant une préfecture essentiellement tibétaine, il y a tout de même une minorité Hui, et il y a d'ailleurs une mosquée à Langmusi. Elle est absolument magnifique et haute en couleurs. Je n'en avais jamais vu de la sorte ! C'est très intéressant ce mélange de cultures. On entend l'appel à la prière de la mosquée d'une oreille, et le chant des moines des monastères de l'autre, et on croise toute sortes de gens dans les rues.
Je ne saurais dire avec exactitude si, aujourd'hui, il existe des rivalités entre les bouddhistes tibétains et les musulmans Hui (je dirais que oui), mais en tous cas, ils semblent coexister parfaitement dans le Gannan. J'ai lu quelque part que les tibétains qui, par principe religieux, refusent de tuer les bêtes de leurs troupeaux, vendent leurs animaux aux Hui, qui se chargent de les abattre et ensuite revendent la viande.
Langmusi se trouve à 7-9h de bus de Lanzhou, la capitale du Gansu. Pour s'y rendre, il faut donc conduire, louer une voiture, ou emprunter le réseau de bus, ce que nous avons fait. Il n'y a pas de liaison directe pour se rendre à Langmusi de Lanzhou, il faut passer soit par Xiahe (4,5h + 4h de trajet), soit par Hezuo (3h + 4h). C'est assez isolé, mais je crois qu'il y a plusieurs bus par jour. En tous cas, nous n'avons eu aucun problème pour nous rendre à Langmusi, si ce n'est les barrages de police et les contrôles récurrents sur la route.
Sur la route, des gens font du stop et négocient avec le chauffeur pour pouvoir monter dans le bus ou pour qu'il les dépose en chemin. Parfois il n'y a plus de place, mais ils insistent. Quand y a plus de place, y'en a encore, c'est ce que voyager en Chine m'aura appris en tous cas ! Parfois, ils montent avec leurs poules, et c'est toute la basse-cour qui caquète pendant le voyage. Pour ma part, j'étais émerveillée par ce qu'offrait le paysage. Je n'avais jamais vu autant de vert, et j'étais sous le charme de ces grandes étendues isolées, où broutent les yaks, les chevaux, les moutons, flottent les drapeaux de prières et courent les marmottes.
Arrivée à Langmusi, je tombe sous le charme de cette petite ville à l'allure de far west. C'est vrai, j'y ai trouvé une ambiance de western. Peut-être est-ce dû aux bâtiments en bois, à la poussière et aux chapeaux que portent les tibétains.
En dehors des façades très colorées de ce qui s'apparente être le centre-ville, Langmusi c'est la campagne. Il n'y a rien, à part des petites maisons très modestes et des murs en terre. Les vaches se promènent d'ailleurs à leur guise dans les rues, et les enfants courent après, tentant de les ramener au près.
Langmusi c'est tout petit, c'est un hameau en pleine nature, et on aperçoit les montagnes tout autour. C'est d'ailleurs l'attraction principale de Langmusi et ce qui fait son charme : la beauté des environs. Il y a d'ailleurs beaucoup de nomades qui s'installent dans les plaines avec leurs chevaux et leurs troupeaux.
Mon activité préférée, ça a été de m'asseoir sur une colline, au milieu des edelweiss, et me délecter de ce paysage alpin au son du chant des moines. Est-ce que j’ai fait 16h de bus pour m’asseoir sur une colline ? Oui, totalement.
Mis à part la beauté de la nature, les deux points d'intérêt majeurs de Langmusi sont ses deux monastères : Kirti Gompa et Sertri Gompa. Gompa signifie monastère en tibétain. Evidemment, je vous en reparlerai plus en détails dans les prochains articles.
Le monastère Kirti se situe dans le côté Sichuan, aux portes des Gorges de Namo, dont je vous parlerai aussi très prochainement. C'est le plus modeste des deux, mais il est absolument magnifique. Il y règne une atmosphère sans égale, que je n'ai retrouvé nulle part ailleurs.
Le monastère Sertri trône, fièrement, de l'autre côté, dans la partie Gansu, sur la colline surplombant la ville. Il est bien plus imposant que son confrère, bien plus riche et sophistiqué.
Il y a des auberges à Langmusi, et il est également possible de passer la nuit dans des campements de nomades. Nous avons logé dans un écolodge en bois un peu éloigné de la ville, en haut d'une colline. Ça s'appelle Trachung Tsang Eco Lodge (lien booking). C'était un peu difficile à trouver par contre, j'ai dû appeler le propriétaire parce qu'on s'était perdu. Les GPS ne marchent pas vraiment à Langmusi, et d'ailleurs sachez que la carte sur la page booking de l'auberge est fausse. A part ça, vraiment, c'était hyper chouette, c'est magnifique et les chambres étaient très confortables, j'étais très étonnée.
Ils ont une grande pièce avec un poêle au milieu et entourée d'une grande bibliothèque remplie de livres tibétains, pour les longues et fraîches soirées. Ils ont aussi une grande terrasse où j'ai adoré me poser avec leur chat. Ils avaient d'ailleurs une petite fille qui aimait beaucoup passer du temps avec moi. Elle me lisait des livres en tibétain et en anglais, et me racontait l'histoire de la région. J'ai passé un agréable moment dans cette auberge et je la recommande fortement. Nous avons payé 364rmb pour deux nuits.
On a tellement adoré Langmusi que nous avons décidé d'y passer une journée de plus. Malheureusement, l'écolodge était complet la 3e nuit, nous avons dû réserver ailleurs, et nous avons pris une nuit dans une auberge dans le centre qui s'appelle Tibetan Barley Youth Hostel (138rmb la nuit, lien booking). C'était pas du tout le même standing, mais ça fait le job. En revanche, ils avaient un grand Golden Retriever, et ça, c'est chouette.
Vous l'aurez compris, Langmusi c’est pour moi un immense coup de cœur. Je suis tombée amoureuse de ses paysages et de l'atmosphère qu'il y règne. J'ai du mal à expliquer pourquoi finalement, peut-être que c'est juste spirituel. En tous cas, aucun autre endroit ne m'a laissé pareille impression.
Néanmoins, ne vous attendez pas à des musées, des restaurants, des visites et d'autres activités culturelles. Si c'est ce que vous recherchez, vous risquez fortement d'être déçus d'avoir fait tout ce chemin pour ça. Il n'y a pas grand-chose à faire à Langmusi, à part partir en randonnée dans les montagnes et les plaines, arpenter les ruelles des monastères et se ressourcer au grand air. Si la campagne c'est pas votre truc, allez juste à Xiahe et au monastère de Labrang.
Je m'arrête là pour aujourd'hui et je vous retrouve bientôt pour la suite de ces aventures !